Frédéric Bisson s’est entretenu avec Geneviève Tellier, professeure de science politique à l’Université d’Ottawa, pour analyser le rôle, les fonctions et les controverses entourant la monarchie constitutionnelle au Canada.
Selon Geneviève Tellier, la monarchie canadienne, bien que largement symbolique dans son apparence, joue un rôle constitutionnel dans le fonctionnement de la démocratie parlementaire. Le roi Charles III, en tant que chef de l’État, est représenté au pays par le gouverneur général au niveau fédéral, et par les lieutenants-gouverneurs dans chaque province. Si leur rôle est en grande partie cérémonial, ils détiennent néanmoins des pouvoirs discrétionnaires qui peuvent être exercés dans des circonstances politiques exceptionnelles.
L’un des exemples les plus concrets de cette fonction résiduelle mais cruciale est survenu en Colombie-Britannique en 2018. Le lieutenant-gouverneur de la province, Judith Guichon, a alors été confrontée à une situation politique délicate : la première ministre sortante, Christy Clark, dont le gouvernement venait de perdre un vote de confiance, souhaitait dissoudre l’Assemblée législative pour déclencher de nouvelles élections. Plutôt que de répondre favorablement à cette demande, Guichon a choisi de refuser la dissolution, permettant ainsi à l'opposition menée par John Horgan de tenter de former un gouvernement minoritaire. Ce geste, bien que rare, illustre la capacité d’arbitrage de la monarchie en cas d’impasse parlementaire, contribuant ainsi à la stabilité du régime sans recourir au suffrage immédiat.
La discussion entre Frédéric Bisson et Geneviève Tellier révèle ainsi toute la complexité de ce débat : entre attachement au passé, logique institutionnelle et aspiration au changement, la monarchie continue de susciter des réflexions profondes sur l’identité politique canadienne et l’avenir des institutions du pays.