Dans cette campagne municipale, on a l’impression que tout se joue entre deux grandes organisations politiques : Action Gatineau et Équipe Mario Aubé.
Elles ont des équipes complètes, des gros budgets, des stratégies, du porte-à-porte coordonné, des cadres financiers… bref, elles occupent tout l’espace. Alors on se posait la question en fin chronique cette semaine : est-ce qu’il reste encore de la place pour les candidats indépendants?
La réponse est oui. Évidemment, le combat est inégal, mais leur rôle est plus important que jamais.
D’abord, les indépendants forcent les partis à parler du terrain. Un indépendant comme Edmond Leclerc à Buckingham, par exemple [Commentaire ici à 9min30], mettait cette semaine de l’avant des enjeux très locaux — l’aréna deux glaces, la lenteur administrative — que les grands partis ne peuvent plus ignorer. Sans lui, ce dossier serait resté sur la glace. C’est la preuve qu’un indépendant peut faire bouger l’agenda.
Dans cette élection, seulement sept candidat·e·s indépendants se sont manifesté·e·s. Du jamais vu à Gatineau. Pourtant, les indépendants jouent un rôle essentiel : ils représentent une réalité que les partis centralisés oublient parfois.
Un parti pense « grande vision ». Un·e indépendant·e pense « mes rues, mes services, mes citoyen·ne·s ». Il ou elle n’a pas de ligne de parti à défendre et, souvent, ce sont ces personnes qui posent les questions que les partis évitent. Elles exposent les angles morts, elles dérangent… Elles ramènent Gatineau quartier par quartier, et c’est sain pour la démocratie.
Et surtout : les indépendants peuvent gagner. Le palier municipal est le seul où l’on élit séparément la mairie et les conseiller·ère·s de district. Au provincial ou au fédéral, choisir un parti revient automatiquement à choisir son chef. Ici, ce n’est pas le cas. On peut élire un·e maire·sse d’un parti, mais une majorité de conseiller·ère·s d’un autre parti… ou même des indépendant·e·s.
Résultat : cela peut créer un conseil fragmenté, des blocages, des rapports de force, voire des guerres de pouvoir. On l’a vu au dernier mandat : ce n’est pas toujours le ou la maire·sse qui crée les tensions, mais la dynamique autour de la table.
Avant de voter, il faut donc penser au résultat d’ensemble : Qui pourra travailler ensemble? Qui risque de passer quatre ans à s’affronter au lieu d’avancer?
En politique municipale, le lien humain est souvent plus fort que le logo. Un·e indépendant·e crédible, présent·e dans son quartier, peut battre un candidat ou une candidate de parti. Et s’il y a plusieurs indépendant·e·s élu·e·s, ils ou elles peuvent devenir les faiseur·euse·s de majorité au conseil. Le ou la prochain·e maire·sse, peu
importe qui, devra travailler avec eux et elles.
Au final, la vraie question de cette élection n’est pas seulement : « Qui sera maire ou mairesse? » C’est aussi : « Avec qui va-t-il ou va-t-elle gouverner? » Parce qu’on ne dirige pas Gatineau seul. On la dirige à 19 autour de la table. Et à cette table-là, les indépendant·e·s peuvent encore changer le jeu.
Suivez-moi avec mon collègue Karl Bélanger chaque jeudi à 13h05 dans LP le midi, Segment 100 % municipal